

Récit du Caporal Charles HURTEBISE (Téléphoniste, 59e BCP)
Lettre du Caporal Charles HURTEBISE, adressée le 27 mars 1916, à Mme la Colonelle Driant par l'intermédiaire de l'Association des Oeuvres de la Croix Verte :
Le 27 mars 1916
Madame,
Excsusez-moi de mon retard que j'ai eu à votre égard de vous donner de mes nouvelles mais attendant toujours des renseignements précis sur le Colonel, depuis notre séparation du 21 Février au matin j'ai hésité à le faire.
Je vais vous décrire en deux mots les derniers instants que j'ai passé avec le Colonel. le lundi matin 21 Février, le Colonel me fit appeler en présence du Lt Petitcollot ainsi que le Caporal Isbled, et nous dit : "Petitcollot, Isbled, et vous Hurtebise, vous allez partir à la ferme de Mormont, où j'irai vous y rejoindre." Le Colonel nous ayant dit depuis quelque temps cette attaque va bientôt se déclancher, mais cette fois l'on s'y attendait et l'on était prêt. Le Colonel partit à cheval comme d'habitude avec un éclaireur.
Après le départ du Colonel, nous partîmes à la ferme de Mormont où les boches commençaient dur à bombarder, partout avec des obus asphixiants, vers 11 heures 11h1/2 le Lt Petitcollot partit ou reçut-il l'ordre?.... de partir au Bois des Caures à la rencontre du Colonel, il partit avec un chasseur, me serra la main, en lui souhaitant bonne chance car, ce pauvre garçon, je ne devais plus le revoir, non plus; vers 13h le Caporal Isbled partit pour se mettre en liaison près du Colonel, c'était son rôle, il revint du Bois des Caures vers 17h30 à la ferme de Mormont avec un pli du Colonel, le bombardement était toujours de plus en plus terrible.
Le Colonel ne put revenir nous retrouver c'est-à-dire à son poste qui était Mormont, à mon idée qui est certaine. Le Colonel n'avait pas voulu quitter le Commandant Renouard. J'ai appris par Isbled, que ce pauvre Petitcollot était grièvement blessé das l'abri de R2. Dès ce moment, Isbled ne me quitta plus, nous avons vécu sous le bombardement avec aussi le sergent Duto ce brave garçon, jusqu'au 22 à 10h1/2 du soir, moi je redescendis; toujours le 21 vers 11h1/2 au Camp Roland et j'en profitai de dérouler une ligne téléphonique à terre pour tacher de pouvoir d'avoir; au moins une seule liaison, je n'y parvins pas car les obus coupait ma ligne au fur et à mesure derrière moi, je fus complètement jeté et couvert de terre, à 50 mètres de Mormont, j'étais à l'entrée d'un entonnoir, je me dégageai rapidement, et courant en déroulant ma bobine de fil, j'arrivais enfin dans l'abri. J'essayai de donner un coup de magnéto sur mon appareil tout était déjà en miette. Je retrouvai Isbled l'on resta à Mormont la journée du 22, mais nous eumes des nouvelles fraiches du Colonel par un cycliste du 56e qui venait du bois, et après ces longues heures passées sous ce bombardement, comme nous n'avions plus rien à faire à Mormont, je proposai à Isbled de partir, et vers 10h du soir, emportant à mon dos appareil et petit matériel du Colonel, ne voulant pas que ça tombe aux mains des boches, je redescendis en vitesse avec Isbled. Il était temps car quelques heures après, beaucoup de mes pauvres camarades y ont trouvé la mort, car à notre départ rien ne tenanit déjà plus, nous avons été préservé. L'on arriva au Camp Roland, plus personne; le Caporal Houin avait enlevé toutes les petites affaires du Colonel, il avait bien fait ce brave garçon, l'on retrouva Houin sur la route de Bras-Vacherauville, et le matin 23, je partais chercher le reste de mon matériel téléphonique au Camp Roland. Le bombardement était toujours aussi terrible sur le Bois des Caures, Mormont et Beaumont, et Bois-de-Ville, tout ce que j'ai appris de mes chers camarades du 59e les derniers chasseurs qui ont quitté le Bois des Caures m'ont affirmé que le Colonel et le Commandant Renouard les avait quitté vers 16h le 22 à la sortit du Bois des Caures, à l'entrée de Joli-Coeur, c'est à ce moment que l'on perdit toute trace du Colonel. Au milieu de tout les faux bruits qui cisrculaient sur le Colonel j'ai hésité jusqu'ici à vous écrire ayant toujours un espour d'une bonne nouvelle à vous annoncer, tant qu'au reste je ne peux rien vous dire de plus. Mais j'ai toujours bon espoir sur son sort, vivrait-il cachait, je le souhaite de tout mon coeur. Quant aux appareils téléphoniques et son petit matériel de cuisine, j'ai tout emballé dans mon atelier téléphonique à Epiez au Sud de la Meuse, le 12 mars prêt à être mis en route à votre destination, le transport à la gare et l'expédition ont du être fait par le Caporal Houin.
Un mot S.V.P. pour m'accuser réception de la malle.
Dans l'attente d'un renseignement exact sur le sort du Colonel j'unis ma douleur à la vôtre ainsi qu'à celle de vos enfants en vous assurant de mon fidèle souvenir.
Votre tout dévoué Caporal Hurtebise
Hurtebise Charles
Caporal Téléphoniste
59e Chasseurs S.H.R.
Secteur 157


